Histoire Cycle 3 NumComplete

L'État protecteur. Ainsi, La Reine Pomare souhaitait maintenir Les chefs, garantir Les propriétés des terres, Les siennes ou celles des autochtones. Mais il faut situer les événements dans leur époque. À Tahiti, La reine Pomare IV ne gouvernait qu'un royaume moribond : depuis L'arrivée des Européens, La population était tombée de soixante-dix mille habitants à moins de dix mille. Les représentants des puissances étrangères (français ou anglais) agissaient sur place comme des proconsuls, tentaient par tous Les moyens d'influencer Les autorités Locales, jouaient plus ou moins habilement des rivalités internes. La Reine ayant rapidement dénoncé Le Protectorat, c'est au prix d'une guerre (18441846) que La France reprit en main ses possessions. Elle replaça d'ailleurs La Reine à La tête du royaume, faute de moyens pour administrer cette terre Lointaine. La petite administration coloniale, incapable d'assurer sa présence aux Marquises (en rébellion jusqu'en 1880), aux îles du Vent, aux Tuamotu et surtout aux Australes, s' arrangea pour appuyer tantôt La Reine, tantôt l'assemblée Législative composée des chefs dont L'autorité avait pourtant été amoindrie. Ce qui frappe surtout c'était L'absence de toute politique française bien définie. Mais, de mesure en mesure, avec des reculs parfois, La souveraineté tahitienne était rongée. Les affaires de terres, par exemple, furent de plus en plus traitées par Les tribunaux français. En 1879, Le ministre en charge des colonies reconnaissait que Les prérogatives royales n'étaient plus que de pure forme. C'est donc presque "naturellement" que La France passa à l'étape suivante : l'annexion de 1880 (possessions du roi), celle des îles Sous-Le-Vent en 1888 (qui dut se concrétiser par des expéditions militaires) et celle des Australes (achevée au début du xxe siècle). Le roi Pomare V, sans doute avec beaucoup de candeur, exprima Le souhait que La France respectât «Les Lois et Les coutumes tahitiennes». «Nous désirons, dit-il encore, que L'on continue à Laisser toutes Les affaires relatives aux terres entre Les mains des tribunaux indigènes». Or, de 1880 à 1940, La tendance fut au contraire (non sans contradiction) d'amener dans Les É.F.O. une Législation étrangère aux coutumes Locales. L'exemple des Toohitu, dernière juridiction indigène en matière foncière, est significatif. Cette institution fut vidée de son contenu et elle cessa de se réunir entre 1932 et 1934. Les tribunaux français eurent toute compétence pour régler Les affaires de terres. Le gouverneur devint L'homme fort de La colonie (décret de 1885), même si La durée de son séjour ne Lui permettait généralement pas d'accomplir une œuvre durable. Au cours de cette période coloniale, peut-on dire que les É.F.O. c'était la France ? D'abord considérons que La présence coloniale ne signifiait pas une extension territoriale pure et simple, comme Lorsqu'une région (par exemple, La Savoie en 1860) devenait partie intégrante de La France. Les colonies bénéficiaient de La spécialité. législative (particularité qui perdure). Cela signifie que Les Lois françaises ne s'appliquent que partiellement, suivant un cheminement fort complexe. De ce fait, La Législation dans Les É.F.O. était un mélange de rigueur, de mansuétude à L'égard des populations locales, de Logique et d'incohérence. S'il y avait donc un "espace de Liberté" pour que Le gouverneur administrât à sa guise, il y avait ce même espace de liberté pour Les élites Locales. Celles-ci réclamaient alternativement, parfois simultanément (selon Leurs intérêts du moment), un resserrement des Liens avec La France, Le maintien des "franchises" Locàles et l'extension des particularismes. Comme l'avait noté Aimé Césaire. pour Les Antilles, Les revendications d'autonomie avaient pris L'allure d'une déferisedes privilèges de ces élites. Mais Les populations Locales, par des mouvements de révolte (aux îles Sous-Le-Vent à La fin du xrxe siècle, par exemple), par Leur passivité ou Leur indifférence à L'égard des autorités, révélaient qu'elles ne se sentaient pas concernées par La présence d'une puissance étrangère. Sur La situation en 1946 Voir le livre du maftre, chap. 25 (1. Après la guerre, des changements trop limités). Sur la situation depuis 1984 Voir le livre du maftre, chap. 25 (6. Les évolutions statutaires depuis 1977). 49

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