Les Chinois de Polynésie française Entre permanence et transformation identitaire

communauté marquée par un fort sentiment d’appartenance et de participation, impliquant également un certain communautarisme. Mais, les propos cités précé- demment ne traduisent pas, à notre sens, la réalité sociale et culturelle des Chinois de Polynésie française. Certes, des éléments communautaristes peuvent persister. Mais il apparaît que cette population serait passée de la communauté à la société au sens de Ferdinand Tönnies. Les liens de solidarité se seraient ainsi effrités. C’est ce qu’il est possible de constater au niveau de l’Association Philanthropique Chinoise, ainsi qu’au niveau des autres associations chinoises du Territoire. En conséquence, l’absence de logique communautaire et l’évolution du mode de vie ne permettent plus à cette association d’avoir un grand nombre d’adhérents. D’après Jade : « On est un peu « pollués » ici [rire] par les autres cultures parce que, regarde, ce qui est inquiétant à l’association, c’est qu’il n’y ait pas beaucoup de jeunes qui soient là. Et ces jeunes, on a essayé de recruter dès notre entrée avec J…. Qu’est-ce qu’ils disaient ? Qu’est-ce que ça va m’apporter d’abord à moi, à l’asso ? C’est-à-dire qu’on n’a pas une démarche bénévole. C’est plutôt l’association qui doit presque donner à chaque individu. Or une association donne toujours quelque chose… Il ne faut pas penser à un retour matériel. On a abordé une quinzaine de jeunes mais ils se sont désengagés, car soit-disant, il ne se passe plus rien à l’association. Il y a toujours des oui pour venir mais pas pour monter. Il n’y a plus de don de soi, pour une communauté. » Le manque de temps est également un argument avancé pour ne pas adhérer à une association, ou pour ne pas y prendre une part active et rester un membre passif. L’A.P.C. nous en fournit un exemple. Selon Adeline : « C’est vrai que les jeunes ne sont pas très « association ». On dirait que pour eux c’est une perte de temps. C’est vrai que ça prend beaucoup de temps. Des fois je débarque à des heures… On rentre tard. » En conséquence, l’affaiblissement des associations chinoises se confirme par la faiblesse quantitative de leurs adhérents. D’après de nombreux membres de l’A.P.C., cette dernière compte environ 300 membres 126 et environ mille 121 126 Aucun registre ayant répertorié d’année en année les adhérents de l’Association Philanthropique Chinoise n’a été retrouvé. Mais selon les archives consultées, on peut supposer que cette association comptait entre 350 et 400 membres au plus fort de son activité. Ces chiffres pourraient correspondre à une moyenne entre les années 1920 et les années 1960. En effet, l’évolution du nombre des adhérents (officiellement inscrits et ayant payé une cotisa- tion) doit être mise en relation avec celle de l’immigration chinoise, ainsi que les événements de 1949 et la ferme- ture des écoles chinoises en 1964. Par la suite, l’intégration et l’acculturation des Chinois ont fait que ces derniers se sont « désintéressés » des associations chinoises, dont l’Association Philanthropique Chinoise. D’autres struc- tures ont ainsi pris le relais de ces associations. Ce qui explique le faible nombre d’adhérents par rapport à la po- pulation chinoise totale du Territoire, et le fait que la plupart de ces membres sont des personnes âgées.

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