Les Chinois de Polynésie française Entre permanence et transformation identitaire

sympathisants. Mais ces chiffres doivent être fortement revus à la baisse, étant donné que 72 personnes sont officiellement 127 inscrites sur les registres de l’association pour l’année 2004-2005. Ces écarts considérables se comprennent si l’on se tient à cette représentation héritée du passé de l’association, celle de la « maison de tous les Chinois ». Par ailleurs, il apparaît que de nombreuses personnes se disent appartenir à l’Association Philanthropique Chinoise, car leurs parents y sont déjà membres. On constate alors à quel point la filiation historique est importante dans les représentations individuelles et collectives des Chinois de Polynésie française. C’est ainsi que l’on entend souvent dire que l’« on appartenait à une association par nos parents. » D’ailleurs, il semble que, selon des informateurs, ce mode de pensée est également véhiculé dans les autres associations chinoises de Tahiti. Certains vont même jusqu’à prétendre qu’ils ne mettront jamais les pieds dans une autre association que la leur. Cette identi- fication est importante, notamment entre les associations chinoises suivantes : Kuo Min Tang, Koo Men Tong et l’Association Philanthropique Chinoise. Ces dernières reflètent une part des identités de leurs adhérents, et elles possèdent chacune des identités marquées. Cet état de léthargie, ce manque de motivation et d’engagement créé par l’affaiblissement numérique des membres de l’Association Philanthropique Chinoise, entraîne une image inerte de cette association. Le bénévolat, sur le- quel fonctionne cette association, est révélateur des difficultés causées par la fin du système communautaire. Ce dernier favorisait le développement des liens primaires 128 et des liens interpersonnels 129 entre les Chinois de l’associa- tion, voire au sein de la communauté chinoise. Il constituait ainsi un réseau d’aide et de soutien important et permettait le fonctionnement de l’Associa- tion Philanthropique Chinoise. Le changement d’un mode de vie et de menta- lité explique la baisse de dynamisme de cette association. La désaffection des jeunes envers l’Association Philanthropique Chinoise et les autres associations chinoises en constitue un exemple parlant et déterminant. Plusieurs membres de l’Association Philanthropique Chinoise essayent, tant bien que mal, de faire venir des jeunes ou de les intéresser à la culture chinoise. Mais ce n’est pas sans peine. John l’interprète ainsi : 122 127 C’est-à-dire que l’on s’est acquitté de la cotisation annuelle permettant de faire partie de cette association. Cette cotisation s’élève à 2 000 FCFP, soit environ 16 euros par an. 128 Association et collaboration intime d’homme à homme (Godbout 1992 : 41-71). 129 Le don à l’intérieur de la sphère domestique (amis, famille…) (Godbout 1992 : 41-71), qui est caractéristique du cycle « donner, recevoir, rendre » décrit par Marcel Mauss dans l’ Essai du don .

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