Les Chinois de Polynésie française Entre permanence et transformation identitaire
son expression pour désigner les Chinois relève donc essentiellement de l’ima- ginaire, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de ce groupe. Pour autant, cela ne veut pas dire que les Chinois de Polynésie française ont perdu leur identité. Tout comme la langue, il nous semble que l’idée de « communauté » reste une référence identitaire majeure, mais qu’elle ne constitue pas le principal élément identitaire du groupe. De plus, il semble nécessaire de nuancer ce constat sur la perte des liens collectifs qui caractérisent une communauté en ce qui concerne les Chinois de Polynésie française. En effet, ces derniers élaborent des liens associatifs forts, dans les associations familiales, les milieux professionnels, les partis ou autres. En fait, les acteurs sociaux ne se limitent plus uniquement aux seuls Chinois de Polynésie française, mais à l’ensemble de la société polynésienne. Cette démarche augmente ainsi le capital social 131 dont disposent initialement les Chinois. Ce capital se construit à partir des relations familiales, claniques et ethniques qu’ils ont constituées. Des intérêts communs peuvent également favoriser la pratique de la solidarité ethnique. Cependant, cette dernière tend à être dissoute dès qu’il n’y a plus d’enjeu collectif. Ce même constat peut s’étendre aux relations familiales et claniques. Ainsi, la communauté chinoise de Polynésie française est finalement plus un groupe fragmenté à l’image de grains de sable formant une plage. Il s’agit d’un ensemble homogène en apparence mais hétérogène dans la réalité. Ainsi, les Chinois de Polynésie française ne sont pas un groupe unifié, comme tendrait à le faire croire l’appellation en cours en Polynésie française de « communauté chinoise » ou de « communauté sino-tahitienne ». La conscience de groupe tend à s’effacer comme le montre la situation actuelle des associations chinoises, et notamment à l’Association Philanthropique Chinoise, au profit de l’individualisme. Le fait que les enfants ne parlent plus la langue de leurs parents, ainsi que la fin des pratiques endogamiques, révèle également les divisions culturelles et sociales qui s’opèrent au sein de la popu- lation chinoise de Polynésie française. La même remarque pourrait s’appliquer à l’ensemble diasporique chinois et à l’ethnie hakka. On retrouve en effet des processus identiques concernant les Hakkas de Polynésie française par rapport aux Hakkas de Chine. Par exemple, l’absence des caractères communs est visible au niveau historique. Jimmy Ly fait ce constat à partir des jeunes générations nées à Tahiti, où leur pays d’origine n’est plus la Chine mais la Polynésie française : 124 131 La notion de « capital social » est à considérer comme l’ensemble des relations et des influences dont on dis- pose et sur lesquelles il est possible de s’appuyer (Bourdieu 1980 : 2-3).
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