Les Chinois de Polynésie française Entre permanence et transformation identitaire

mœurs polynésiennes. À cette période en effet, en parcourant les quotidiens, vous pourrez vous apercevoir que de nombreuses entreprises souhaitent leurs meilleurs vœux à cette occasion, aussi bien des entreprises chinoises que non- chinoises. Cet événement n’est plus uniquement partagé par les Chinois, mais également par les personnes non-chinoises. Il est alors fréquent de voir participer des Demis, des Tahitiens, des Popa’a 141 aux manifestations culturelles organisées à cette occasion. D’ailleurs, en se promenant dans les rues de Papeete, on aurait pu s’apercevoir que le lion de cette année n’avait pas forcément les yeux « bridés ». La reconnaissance de ces différences culturelles est une occasion de réaffirmer son ethnicité, et les références identitaires sont véhiculées par le renouvellement de ce type d’événement au cours de chaque année. On peut également observer le même type de phénomène lors de la commémoration de la journée du 1 er Octobre, lors de la fête nationale chinoise. Il s’agit d’un moment de revendication identitaire et culturelle, au cours de laquelle cette dernière apparaît dans toute son ampleur. À cette occasion, on rappelle qui l’on est et d’où l’on vient, mais également on montre qui l’on est. Une réflexion informelle comme celle-ci : « Avant, on était Chinois sans l’être… » démontre que la reconnaissance identitaire est souhaitée. Par ailleurs, il semble que l’intégration et l’assimilation ont suscité la réflexion du multiculturalisme au sein de la population chinoise de Polynésie française. Grâce cette démarche, la figure de l’Étranger, dont furent affublés les Chinois de Polynésie française, apparaît également être exorcisée. On n’a plus honte de se dire Chinois, et on met en scène (Goffman : 1973) son identité chinoise. L’A.P.C. crée ainsi des références identitaires, historiques et culturelles. Les discriminations et les représentations négatives que subissent ou ont subi les Chinois de Tahiti ont abouti à la valorisation de l’identité chinoise, à la suite de leur intégration et de leur assimilation à la société polynésienne. Il s’agit alors non seulement de faire reconnaître une identité, mais également de faire respecter les différences culturelles dans l’égalité et la dignité. L’anonymat n’est plus la stratégie identitaire 142 adoptée par rapport au milieu hostile que fut la société coloniale. Elle consiste à se fondre dans la foule ou à se faire oublier du groupe majoritaire pour maintenir une situation socialement confortable (Camilleri 1990 : 34). 134 141 Le terme Demi désigne un métis qui est né et qui vit en Polynésie française, un Popa’a : un Européen. 142 Les stratégies identitaires désignent : « les procédures mises en œuvre (de façon consciente ou inconsciente) par un acteur (individuel ou collectif) pour atteindre une ou des finalités (définies explicitement ou se situant au ni- veau de l’inconscient), procédures élaborées en fonction de la situation d’interaction, c’est-à-dire, en fonction des différentes déterminations (sociohistoriques, culturelles, psychologiques) de cette situation. » (Camilleri 1990 : 24).

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