Les Chinois de Polynésie française Entre permanence et transformation identitaire
Cette valorisation et cette reconnaissance identitaire par la différen- ciation ont pour objectif la visibilité sociale et la singularisation culturelle. Ainsi, par ses actions publiques, cette association élabore une identité et une représentation collectives d’une communauté chinoise soudée et unique. De nombreuses personnes extérieures à cette « communauté » pensent ainsi que l’A.P.C. regroupe en son sein l’ensemble de cette communauté imaginaire. Selon l’extérieur, il s’agit d’une association mère ou de la seule association chinoise. Fred nous fournit un exemple de cette méconnaissance du milieu associatif chinois par les personnes extérieures à ce groupe : « Dans la communauté chinoise, l’Association Philanthropique Chinoise est un maillon, tu as encore beaucoup d’associations à côté. Avant, moi, je croyais que la communauté chinoise c’était l’A.P.C.… Je pensais que tous les Chinois étaient sous l’A.P.C., ou encore, sous Kuo Min Tang. » Comme nous venons de le voir, cette représentation collective est liée aux démarches en faveur de la reconnaissance identitaire et à la mise en scène d’une identité chinoise par le milieu associatif chinois. Les associations chinoises, dont l’Association Philanthropique Chinoise, semblent donc entretenir un mythe communautaire que les médias véhiculent et contribuent également à renforcer lorsqu’ils évoquent des événements organisés par ces associations au nom de la « communauté chinoise » ou de la « communauté sino-tahitienne ». Néanmoins, cette image, et l’identité chinoise qui lui est associée, est également construite et entretenue par les non-Chinois, le groupe dominant majoritaire. Ce dernier projette ses représentations sur les Hakkas et les Puntis de Polynésie fran- çaise. Il ne fait pas de différence entre ces deux ethnies et les réduit à un seul groupe, celui des Chinois. Néanmoins, il est nécessaire de nuancer les propos pré- cédemment cités. En effet, pour pouvoir différencier les Hakkas et les Puntis, il faut avoir conscience de leur différence. Ainsi, les non-Chinois ne sont généralement pas conscients de ce fait, mais également certains individus du groupe chinois. Chez les Chinois, cette « homogénéisation » se vérifie surtout à partir de la troisième ou de la quatrième génération installée et née en Polynésie française. Dans cette perspective, l’Association Philanthropique Chinoise est exemplaire d’un espace où se jouent les interactions entre les Chinois et les non-Chinois, où se forge une identité chinoise globalisante au niveau de la Polynésie française. Yves dit ainsi qu’ : « À Philanthropique, c’est sous-entendu qu’on est chinois, on est hakka parce qu’on va pas dire Association Philanthropique des Hakkas. C’est restreindre 135
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