Les Chinois de Polynésie française Entre permanence et transformation identitaire
collective et individuelle. Mais elle se confronte également au sentiment de si- nité qui imprègne cette association et ses membres par rapport aux références identitaires transmises par la société polynésienne. 1) Des stratégies identitaires tendant vers la recomposition identitaire Il semble que les identités collectives et individuelles sont intimement liées, et qu’elles ne peuvent pas exister l’une sans l’autre. Ainsi, l’A.P.C. offre l’opportunité de percevoir cette articulation à travers les stratégies identitaires (Camilleri : 1990) mises en place par ses membres et cette association même. Dans cette perspective, il faut tout d’abord reconnaître qu’il s’agit d’un lieu privilégié où les identités sont constamment négociées, aussi bien au niveau in- dividuel qu’au niveau collectif. Ces identités ont évolué dans le temps en fonc- tion de la société environnante. Les enjeux définis et les finalités identitaires ont changé depuis l’état d’association communautaire. En effet, les stratégies identitaires ne sont plus caractérisées par l’anonymat et le refus de l’assimilation. Depuis la naturalisation massive et l’intégration des Chinois de Polynésie française, ces derniers sont confrontés à des problématiques identitaires dont l’enjeu renvoie leur place au sein de la société polynésienne et française. Néanmoins, n’oublions pas qu’il faut également relativiser ce constat, dans la mesure où ces problématiques identitaires « surgissent » à partir du moment où l’acteur social concerné en est conscient. John fournit ainsi la réponse suivante suite à cette question : « Es-tu Chinois, Polynésien ou Français ? » : « Je me pose rarement la question. Je me suis posé la question en France. C’est quand tu n’arrives pas à faire ta place que tu te poses cette question. C’est quand t’arrives pas à être bien. Si tu t’adaptes bien… finalement… Je peux pas répondre car je ne me suis pas bien posé la question. » On constate que cette prise de conscience suppose le manque de reconnais- sance identitaire et une inadaptation de l’acteur social à son environnement. Par ailleurs, elle survient à la suite d’éléments déclencheurs qui peuvent être multiples, singuliers et échelonnés dans le temps. Les interactions exogènes et endogènes sont donc en partie à l’origine des problématiques identitaires. Les réflexions de John semblent confirmer cette hypothèse : « À Tahiti, on te dit que t’es pas Tahitien car tu ressembles à un Chinois, quand tu vas en France, on te dit t’es pas Français parce que tu es né à Tahiti, tu vas en Chine, tu te fais niquer parce que tu ne parles pas chinois, tu te fais même engueuler… l’association va permettre de recentrer un peu tout ça… » 137
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