Les Chinois de Polynésie française Entre permanence et transformation identitaire

globale qui efface leurs différences 146 . À la question, si l’on fait encore la différence entre un Hakka et un Punti. Emmanuelle répond : « Chez les jeunes c’est différent, peut-être chez l’ancienne génération. C’est fini maintenant. Aujourd’hui, je pense que les jeunes Chinois ne savent même plus qu’ils sont chinois. Le problème, c’est qu’ils ne savent plus où se situer. C’est encore plus inquiétant. » Cette réponse met l’accent sur l’absence ou le manque de repères chinois, aussi bien identitaires que culturels, que l’on peut constater aujourd’hui chez les jeunes générations. Les références identitaires chinoises n’apparaissent donc pas prédominantes par rapport aux autres références identitaires présentes au sein de la société polynésienne. Toutes les références identitaires chinoises, polynésiennes et françaises semblent alors imbriquées. Elles possèdent les mêmes valeurs d’identification, mais leurs significations et leurs emplois divergent en fonction des acteurs sociaux. Par exemple, pour illustrer ces divergences, on peut reprendre la remarque d’Yves qui confie faire la diffé- rence entre les Chinois et les Hakkas. Les Hakkas constituent ainsi une ethnie chinoise particulière, et ils possèdent leur propre culture. Cela se traduit notamment par la mise en place de chaînes de télévisions hakkas, de radios hakkas, de musées hakkas, d’universités hakkas par les gouvernements locaux au niveau des régions chinoises. Selon Yves, ces différences n’empêchent pas de se sentir et d’être chinois 147 . Par ailleurs, il est nécessaire de rappeler que d’après les statuts de l’Association Philanthropique Chinoise, cette dernière a pour objectif de promouvoir et de développer la culture chinoise en Polynésie française. La culture hakka fait partie de cette culture. Elle représente ce qu’il faut retrouver et faire connaître à l’ensemble des Chinois de Polynésie française. En fait, elle relève de l’intime et du privé, de ce qu’est véritablement le fond culturel de la majorité des Chinois de Polynésie française. À l’Association Philanthropique Chinoise, l’identité hakka est une identité « sous-entendue » et enveloppée par une identité chinoise plus globale et intégrative. Ce constat semble pouvoir s’étendre à l’ensemble de la population chinoise de Polynésie française. Pour autant, la revendication de l’identité hakka n’est pas absente. Elle émerge, notamment au travers des ouvrages de l’écrivain Jimmy Ly et du 140 146 Cette homogénéisation entre Hakka et Punti était impossible à partir du moment où les divisions régnaient entre ces deux groupes. Chacun préservait son identité ethnique et clamait la valeur de sa sinité. 147 Ce sentiment d’appartenance à échelle variable se retrouve à travers d’autres parties du monde. Ainsi, un Bre- ton et un Auvergnat se sentent Français. Cette appartenance est remise en cause que dans le cas où il existe un rapport dominant-dominé, comme en Corse par exemple.

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