Les Chinois de Polynésie française Entre permanence et transformation identitaire
de même quand il s’agit de confronter entre elles les mémoires collectives concernant les différentes associations en présence. Cette opération favorise le développement d’une mémoire d’association spécifique. En outre, chez certains, la mémoire familiale revêt également la forme d’une mémoire générationnelle : “La mémoire générationnelle est une mémoire à la fois horizontale et verticale qui présente deux formes, l’une ancienne, l’autre moderne. La forme ancienne est une mémoire généalogique étendue bien au-delà de la parenté. Elle est la conscience d’appartenir à une chaîne de générations successives dont le groupe ou l’individu se sent peu ou prou l’héritier. C’est la conscience d’être les continuateurs de nos prédécesseurs.” (Candau 1996 : 54) Comme en témoigne John, c’est dans cette logique que de nombreux membres de l’Association Philanthropique Chinoise s’inscrivent. Ils ont le sen- timent de continuer l’œuvre de leurs prédécesseurs, et notamment celle de leurs parents. John explique que c’est : « Un peu une certaine tradition, mon arrière-grand-père y était, mon grand- père y était membre d’honneur jusqu’à il y a pas longtemps… » C’est également en mémoire de son père qu’Adeline s’est inscrite à l’Association Philanthropique Chinoise : « Je suis rentrée dans l’Association Philanthropique parce que mon père, au temps où il y avait des écoles philanthropiques, où les gens se scolarisaient dans les écoles chinoises, mon père était professeur de chinois, j’étais toute jeune, mes sœurs y allaient… Et c’est en sa mémoire. » Cette mémoire générationnelle s’inscrit dans un temps long et dans la durée. Elle imprègne également la mémoire de l’association, donnant à ses membres la sensation de continuer et de pérenniser l’œuvre de ses fondateurs. Ainsi, l’Association Philanthropique Chinoise constitue un patrimoine familial (Nora 1997 : 1433), qu’il est nécessaire de préserver et de transmettre. Cette « conscience d’être les continuateurs de nos prédécesseurs » s’incarne dans cette association qui se vit comme faisant partie d’un héritage. C’est notam- ment le cas chez Martin. Ce dernier nous parle ainsi de son adhésion : « Les premiers pas dans l’association, proprement dits, c’était un désir d’appor- ter ma pierre en tant que petit-fils G.T, tout simplement parce que mon grand- père était ici, à Tahiti, il fréquentait énormément l’École Philanthropique. Ensuite, mon père, je le suivais à plusieurs occasions lors de festivités, ou des rencontres, ou des réunions que mon père tenait à l’époque avec ses 70
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