Les Chinois de Polynésie française Entre permanence et transformation identitaire

Après tout ce qui a été exposé, l’idée selon laquelle il s’agit effective- ment d’un patrimoine, ou du moins d’un objet en cours de patrimonialisation 66 , reste forte. Si ce n’est pas le cas, on peut au moins soutenir que l’Association Philanthropique Chinoise reste un bien culturel. En effet, il s’agit de la trace matérielle d’une culture. Par ailleurs, l’idée de sa conservation existe chez ses membres à cause de la mémoire et de l’histoire que cette association draine. De plus, l’Association Philanthropique Chinoise constitue une référence identitaire en tant que trace mnésique du passé. C’est notamment ce qu’il ressort de l’entretien effectué avec Adeline, elle m’a ainsi confié avec émotion : « On a quand même une belle école malgré qu’il fait un peu chaud. Elle est imposante par rapport au Kuo Min Tang, par rapports aux autres. Elle est belle (le son de sa voix marque bien ce propos). L’autre jour, avec Y., on sortait d’une réunion et je lui ai dit : Au cœur de la ville on a une belle association. C’est un bâtiment dont on peut être fier. » La nécessité de conserver ce bâtiment et l’association qu’il abrite trans- paraît à travers les propos de cette informatrice. L’Association Philanthropique Chinoise ne représente pas que de simples murs ou des locaux désaffectés. En fait, elle possède une valeur symbolique et matérielle pour ses membres. L’Histoire et des histoires l’habitent. De plus, c’est toute l’image de la Chine qui se dessine à travers l’Association Philanthropique Chinoise. Dans le processus d’installation et d’implantation des Chinois en Polynésie française, l’Association Philanthropique Chinoise, au même titre que les autres associations chinoises, joue un rôle important dans la structuration de cette communauté. Elle permet d’en regrouper une partie selon des pratiques sociales communautaires. Cette association se constitue alors à l’instar d’un « village urbain ». Ce dernier est un lieu d’expression identitaire et de trans- mission culturelle pour les Chinois. Son souvenir reste encore vivace de nos jours, comme en témoigne son statut d’objet de mémoire. L’Association Philanthropique Chinoise est à la fois un objet de mémoire pour ses membres, mais également un objet historique pour l’histoire de la communauté chinoise de Polynésie française. Elle est ainsi le sujet de représentations diverses et variées qui la constituent en patrimoine réel et idéel. Tous ces processus liés à 75 66 Cette considération doit certainement être relativisée. Elle dépend du regard que l’on porte sur l’Association Philanthropique Chinoise et est donc relative à chacun. Je pense également qu’il en est de même pour le Kuo Min Tang, le Koo Men Tong et le Si Ni Tong (ce dernier serait un patrimoine idéel puisqu’il ne marque pas autant ou de la même manière l’espace que les trois autres associations chinoises. Le Si Ni Tong gère notam- ment le temple chinois de Mamao et le cimetière chinois de Arue. Ces derniers constituent pour les Chinois de Polynésie française des objets patrimoniaux.).

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