Les Chinois de Polynésie française Entre permanence et transformation identitaire
l’avons exposé. Ensuite, toutes ces personnes viennent alors pour manger, boire, rencontrer, discuter, ou pour voir une exposition. Ainsi, l’Association Philanthropique Chinoise devient tour à tour un espace de circulation, de rencontre, de communication et de consommation en fonction de ce qu’on y fait et de ce qu’on y cherche. On peut y être visiteur d’un moment, élève en cours de mandarin ou de hakka, pratiquant de kung-fu ou de tai-chi, danseuse de danses polynésiennes ou encore dîneur pour un bal 76 . Ce lieu devenu non-lieu produit ainsi l’identité des personnes qui s’y rendent, et notamment par les règles qu’il édicte. Par la suite, ces règles organisent un ordre social en fonction des activités qui s’y déroulent : “… alors que c’est l’identité des uns et des autres qui faisaient le lieu anthro- pologique, à travers les connivences du langage, les repères du paysage, les règles non formulées du savoir-vivre, c’est le non-lieu qui crée l’identité des utilisa- teurs… Seul mais semblable aux autres, l’utilisateur du non-lieu est avec celui-ci (ou avec les puissances qui le gouvernent) en relation contractuelle. L’existence de ce contrat est rappelée à l’occasion (le mode d’emploi du non-lieu est un élément) : le billet à acheter, la carte pour le péage… Le contrat a toujours rapport avec l’identité individuelle de celui qui y souscrit.” (Augé 1992 : 128) À l’Association Philanthropique Chinoise, ce contrat a souvent la forme d’une cotisation vous donnant le droit d’en être membre. Il peut égale- ment s’agir d’une facture vous permettant d’accéder aux cours de mandarin ou de hakka, ou encore, de louer la grande salle en vue d’y donner une confé- rence ou un dîner dansant. C’est par exemple le cas d’associations familiales tahitiennes ou d’associations pour la défense des droits de la Femme ou de l’Enfant. Ces associations louent la dite salle pour organiser des dîners dansants, où l’on sert fréquemment des mets chinois accompagnés d’un orchestre de variétés polynésiennes. Ainsi, l’Association Philanthropique Chinoise n’est plus le seul fait des Hakkas ou des Chinois de Polynésie française. Il est désormais fréquent d’y croiser et d’y rencontrer des personnes extérieures au groupe ethnique chinois. Cet espace n’est plus refermé sur lui-même comme auparavant et selon les principes qui régissaient l’Association Philanthropique Chinoise en tant qu’association communautaire. Si l’une des caractéristiques majeures de l’Association Philanthropique Chinoise est celle d’être un lieu devenu un non-lieu, cette association se définit 81 76 Une nuance est à apporter ici. En effet, toutes ces activités ne sont pas assurées par l’Association Philan- thropique Chinoise mais par d’autres associations qui louent l’usage de la grande salle située au rez-de-chaus- sée du bâtiment. C’est notamment le cas pour les cours d’arts martiaux et de danse polynésienne.
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