Les Chinois de Polynésie française Entre permanence et transformation identitaire

également par le fait qu’elle est devenue un espace public, tout en gardant en mémoire qu’elle est aussi un espace privé. Il est fréquent que les quotidiens polynésiens rendent compte des évé- nements qui se déroulent au sein de l’Association Philanthropique Chinoise, comme les expositions culturelles et les dîners dansants. Ils confirment ainsi que cette association est devenue un espace public selon la définition de Marc Augé : “Nous appellerons espace public l’espace du débat public (qui peut prendre des formes diverses et éventuellement non empiriquement spatiales) et espaces du public les espaces où effectivement, empiriquement, les uns et les autres se croisent, se rencontrent et, éventuellement, débattent. Nous distinguerons de même espace privé (celui des affaires privées) et espace du privé (au sens stric- tement spatial de la résidence privée).” (Augé 2003 : 140) En devenant un espace « offert » au public, l’Association Philanthropique Chinoise n’est alors plus, à proprement parler, un territoire ethnique appartenant à une ethnie spécifique. Du moins, son intérieur et son extérieur se confondent désormais. Il n’est plus un espace fermé et clos sur lui-même. En effet, les frontières symboliques et spatiales d’autrefois n’ont plus cours. Elles n’ont plus lieu d’être, notamment depuis l’obtention en nombre de la nationalité française par les Chinois de Polynésie française. Chacun est libre de se rendre à cette association tant que l’on en respecte les règles. Par ailleurs, les critères d’appartenance ethnique n’y conditionnent plus aussi strictement les allées et venues des visiteurs. Tout comme cela était le cas autrefois. L’Association Philanthropique Chinoise oppose les notions de lieu et de non-lieu, comme de public et de privé, tel que Marc Augé l’exprime : “Chacune des deux notions (non-lieu et espace public) peut être opposée à celle dont elle tire son sens, le non-lieu au lieu, l’espace public à l’espace privé. Nous savons pourtant que ces deux oppositions (espace public/espace privé ; non-lieu/lieu) sont relatives. C’est là ce qu’elles ont en commun.” (Augé 2003 : 138) Ainsi, le domaine privé est issu et représenté par le vécu et l’histoire de cette structure. Ce qui aboutit à faire de l’Association Philanthropique Chinoise un objet privé pour ses membres et les Chinois de Polynésie française. En effet, pour certains, cette association est intimement liée à leur identité. Elle s’ac- compagne donc d’une appropriation de cet espace. Il en est de même pour la composition des membres du bureau et du conseil d’administration. Ces derniers ne peuvent être que chinois. D’ailleurs, cette représentation rentre quelque peu en contradiction avec la structure associative en tant que forme démocratique (Barthélémy 2000). Mais il est vrai que celle-ci est fréquente dans le milieu 82

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