Les Chinois de Polynésie française Entre permanence et transformation identitaire

questions. J’ai trouvé ça très drôle. Ça fait partie du questionnaire des Chinois : Quel âge as-tu ? Es-tu mariée ? Célibataire ? Qui est ton ami ? Mari ? Ils veulent tout savoir. » Dans le contexte insulaire polynésien, ce questionnaire chinois permet de créer des liens symboliques par personne interposée. Il a surtout pour objectif de savoir si l’on possède le même Siang ou des liens de parenté : le t’sin ts’it . Il semble que les Hakkas se soient basés sur d’autres références ethniques pour créer leur association. Comme en témoigne Ernest Sin Chan : “La prise en considération du même patronyme (T’ung Siang) ou de la même localité (t’ung hsien) comme base de création d’association ou d’organisation formelle n’a pas beaucoup été utilisée par les Hakkas bien que dans la vie quotidienne, les relations formelles ou informelles tiennent compte de cette dimension T’ung Siang (lien patronymique) et ts’in ts’it (lien de parenté) car cette identification de liens de parenté existant engage des rapports de solidarité et de confiance dans toute rencontre ou négociation.” (Sin Chan 2004 : 163) En effet, le fait que les associations chinoises locales n’aient pas retenu le critère patronymique lors de leur création s’explique par le caractère hostile de la société coloniale et la faiblesse numérique des Chinois. Par ailleurs, les relations essentiellement intra-familiales auraient limité le champ des sociabilités. Le système de relations fondé sur la parenté n’est pas pour autant absent du fonctionnement des associations chinoises. Il se retrouve notamment à l’Association Philanthropique Chinoise. Le bureau et le conseil d’administration sont représentatifs de cette pratique dans l’ensemble de la communauté chinoise de Polynésie française. Ils sont principalement composés de deux Siang : Liu et Tching. Ces liens de parenté fondent des liens de solidarité familiale 96 . Ils im- prègnent l’Association Philanthropique Chinoise. Ainsi, cette présence fami- liale et la familiarité du lieu est notamment affirmée par John : « Pourquoi j’aime l’association ? Parce que c’est là, que ça permet de rencon- trer des gens qui te sont proches, qui appartiennent au même clan. » 98 96 « Dans ses travaux sur les relations économiques des Chinois dans les Îles de la Société, Moench (1963) a beaucoup insisté non seulement sur les liens de solidarité familiale et sur l’organisation au sein de l’entreprise familiale comme unité productrice, mais aussi sur les liens de solidarité familiale étendue aux membres de la parenté et du clan de même patronyme ainsi qu’aux membres appartenant à la même localité dans la province d’origine en Chine et qui ont des liens de parenté par alliance. N’oublions pas ce proverbe hakka qui contraint les membres du groupe à fonctionner avec cette valeur : Chut mun tao tsu hoi ju ch’in ngin, qui signifie que quand on sort de chez soi, il faut partout avoir de la famille et pouvoir compter donc sur quelqu’un de la famille. » (Sin Chan 2004 : 157). Cette solidarité familiale semble être commune à tous les Chinois.

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