Une histoire de l'Océanie

afin de nourrir les esclaves. Ayant longé l’Australie, Bligh arrive à Tahiti en octobre 1788 puis repart avec les plants plus de six mois plus tard. Mais en avril 1789, Fletcher s’empare du navire et abandonne Bligh en mer qui parvient à rejoindre en juin 1789 Timor. De son côté, Fletcher tente en vain de s’installer à Tubuai (Australes) en mai 1789 puis, après un dernier passage par Tahiti, décide de trouver une île pour échapper aux recherches prévisibles de l’amirauté britannique : ce sera, en janvier 1790, Pitcairn (dont la longitude n’avait pas été fixée par Carteret mais qui figurait sur certaines cartes de la marine britannique). À Pitcairn, marins anglais et Tahitiens s’entretueront et l’île peuplée par les survivants (en fait le matelot Adams, des femmes tahitiennes et des enfants) ne sera redécouverte par un baleinier américain qu’en 1808. Trois faits marquent la fin du XVIIIe et le début du XIXe siècle dans cette région. • Les Espagnols, inquiets de la venue des Anglais, des Français et des Russes dans le Pacifique, organisent en vain deux séries d’expéditions : d’abord trois voyages entre 1772 et 1775 puis un ultime voyage entre 1789 et 1794. Tahiti, du fait de ses ressources alimentaires importantes, apparaît comme le principal point de mire des Espagnols (c’est à cette occasion que le matelot Máximo Rodriguez séjourne à Tahiti ; c’est aussi en 1772 que les Espagnols relâchent à l’Île de Pâques pour y faire signer par les Pascuans un traité de prise de possession qui inspirera sans doute les tablettes rongo rongo). Quant à l’expédition de 1789-1794 dirigée par Malaspina et partie de Cadix en Espagne, elle a pour but de revendiquer – vainement bien sûr – la souveraineté espagnole sur les mers du Sud (rappelons que le dernier « Galion de la soie » de Manille partira en 1811). Cette revendication repose, selon Madrid, sur l’antériorité de la présence des Espagnols dans le Pacifique. Mais Malaspina est aussi un homme des Lumières (Ilustración), il participe à l’approfondissement des connaissances scientifiques de l’époque et à la réalisation de travaux cartographiques importants. • Entre 1803 et 1815, les Russes s’intéressent aux régions plus méridionales du Pacifique, font régulièrement du commerce à Hawaï, reconnaissent les Marquises (c’est à cette occasion qu’en 1804, le capitaine Krusenstern enlève aux Marquises le matelot naufragé Kabris ; c’est aussi ce capitaine qui cartographie une grande partie des îles Marshall en 1803). Plus tard, au XIXe siècle, des navigateurs russes comme Bellinghausen (qui donnera son nom à une île des Îles Sous-leVent) sillonneront le Pacifique Sud mais sans conséquence politique. • Enfin, dans le premier tiers du XIXe siècle, l’Allemand von Humboldt, l’Anglais Darwin (aux Galápagos entre 1831-1836) et le Français Dumont d’Urville parachèveront l’exploration scientifique de l’océan Pacifique. Dumont d’Urville, l’auteur de la division de l’Océanie en quatre aires distinctes, mettra fin au mystère de la disparition de La Pérouse et abordera même le continent antarctique, terminant ainsi le voyage géographique et intellectuel de Cook. À la fin du XIXe siècle, tout le Pacifique et l’Océanie insulaire ont été explorés par les Occidentaux (seul l’intérieur de quelques îles leur reste inconnu). 41 Le maro ’ura est une ceinture faite de plumes rouges et jaunes sacrées cousues sur une natte fine tressée, de plus de 3,50 m de long. Ce maro décrit par Bligh est le symbole du pouvoir absolu. (Dessin réalisé d’après une description du capitaine de la Bounty William Bligh)

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