Une histoire de l'Océanie

Le début du XXe siècle correspond d’abord à l’affirmation des colonies britanniques d’Australie et de Nouvelle-Zélande. Au début du XIXe siècle, des dizaines de milliers de convicts avaient été déportés en Australie, jusqu’en 1868, date de la fermeture du bagne. L’élevage des moutons s’était développé pour fournir de la laine à l’industrie textile britannique. L’exploration de l’intérieur du continent australien fut difficile : en 1861, lors de la première traversée sud-nord, Burke et Wills moururent de faim sur le chemin du retour malgré l’aide des Aborigènes, à quelques heures de marche du camp de base de Cooper Creek. Au milieu du XIXe siècle, la découverte de gisements d’or avait déclenché une immigration importante vers l’Australie (et la Nouvelle-Zélande). Bagnards, colons, squatters*, diggers* avaient refoulé les Aborigènes vers l’intérieur désertique. Au mieux, les Aborigènes étaient devenus ouvriers agricoles dans le bush* ou pisteurs pour l’armée. Au pire, ils avaient été tués malgré une résistance sporadique. Vers 1860, l’Australie compte environ 1 000 000 habitants et en 1900, 4 000 000. L’évolution politique est remarquable : en 1901, le statut de dominion avec Canberra comme capitale (proclamation du Commonwealth d’Australie) confère à l’Australie une totale autonomie interne soit une quasi-indépendance même si la reine d’Angleterre reste la souveraine en titre (l’Australie occidentale sera réunie à cet ensemble plus tardivement). Les liens restent étroits avec le Royaume-Uni : l’Australie envoie des soldats en Afrique du Sud pendant les deux Guerres des Boers (1880-1881 et 1889-1902). L’Australie se définit comme un dominion « blanc » : les lois ferment le pays aux immigrants non-européens, les migrations de travailleurs mélanésiens cessent en 1901, les Aborigènes sont ignorés. Les 65 000 Aborigènes du pays (à la date de 1900) sont gérés autoritairement par un « Bureau central de protection » (des milliers d’enfants sont arrachés à leurs familles et placés dans des institutions chrétiennes). Il faudra attendre les années 1930 pour que les Aborigènes commencent à contester cet état de fait sans pour autant obtenir la citoyenneté. L’importance régionale de l’Australie se précise. Le RoyaumeUni confie dès 1906 la tutelle du quart sud-est de la Nouvelle-Guinée à l’Australie. Au début du XXe siècle, l’Australie a donc connu une mutation à la fois démographique, sociale, économique et politique. La Nouvelle-Zélande suit une évolution analogue. Au début du XXe siècle, la Nouvelle-Zélande est sortie des deux Guerres maories (1842-1846 et 1860-1868) causées par des expropriations foncières contraires au traité de Waitangi. Dans les années 1840, les expropriations ont été liées à l’installation de colons agricoles ; dans les années 1860, elles ont été liées à la ruée des chercheurs d’or. Les Maoris sont marginalisés dans leur propre pays. Leur situation, cependant meilleure que celle des Aborigènes voisins (les Maoris ont quatre députés dès la fin du XIXe siècle), ne s’améliorera réellement que dans les années 1930. Comme l’Australie, la Nouvelle-Zélande devient un dominion avec une totale autonomie interne en 1907, et Wellington comme capitale (dès 1901, la tutelle des îles Cook et de Niue est confiée à la Nouvelle-Zélande, montrant le partage des responsabilités régionales entre les deux dominions). Les rivalités entre États européens et le jeu des alliances entraînent la Première Guerre mondiale. Du fait des possessions coloniales, la guerre se déroule aussi dans l’océan Pacifique. Les opérations furent d’envergure limitée. Deux camps très inégaux s’affrontent dans le Pacifique : les Britanniques, les Français et les Japonais contre les Allemands. Les Japonais interviennent dans ce conflit principalement européen pour s’approprier les colonies allemandes en situation de vulnérabilité ; de plus, le Japon n’avait pas supporté l’établissement d’un protectorat allemand sur la péninsule du Shandong en Chine à la fin du XIXe siècle. Les États-Unis rentreront en guerre en 1917 quand les combats seront terminés depuis longtemps dans le Pacifique. La reconstitution du périple de l’escadre allemande de l’amiral von Spee permet de comprendre le déroulement des opérations dans le Pacifique. En 1914, von Spee reçoit l’ordre, grâce au réseau radiotélégraphique allemand, de retourner en Europe du fait de la disproportion des forces dans le Pacifique. L’amiral doit évidemment récupérer les hommes éparpillés dans les colonies allemandes d’Océanie. La base de l’escadre est le port de Qingdao dans la péninsule du Shandong mais, quand la guerre commence en juillet/août 1914, l’escadre effectue des manœuvres navales en Micronésie. Se trouvant donc aux Carolines, la flotte rallie les Mariannes, les Marshall (faute de temps, Nauru est abandonnée à son sort et investie par les Australiens). Quand la flotte parvient aux îles Samoa, la colonie est déjà aux mains des Britanniques. Dès lors, un problème majeur se pose à von Spee : l’approvisionnement en charbon. L’escadre de von Spee fait escale à Bora Bora où elle rafle un peu de charbon en se faisant passer pour une flotte anglaise ; puis von Spee tente en vain de s’emparer du dépôt de charbon à Tahiti préventivement incendié par le commandant 63

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