Une histoire de l'Océanie

Par ses conséquences, la Seconde Guerre mondiale met fin à la domination des Occidentaux en Asie. Mais elle consacre la pérennisation de l’influence anglo-saxonne dans le Pacifique et en Océanie en dépit de l’accession à l’indépendance de nombreux territoires. Au nord de l’équateur, le Pacifique devient un « lac américain ». Les nouveaux territoires qui passent sous contrôle américain permettent aux États-Unis d’endiguer la poussée communiste dans le cadre de la nouvelle Guerre froide (containment). Dès 1946, les relations américano-soviétiques se détériorent. Les États-Unis donnent l’indépendance aux Philippines mais y conservent des bases militaires. En 1949, la Chine continentale devient communiste et en 1950 éclate la guerre de Corée. Les Mariannes, Guam et Belau sont intégrés au dispositif militaire américain en formant une seconde ligne de containment derrière la première ligne formée par les Philippines, Taïwan (à partir de 1949), la base militaire d’Okinawa aux Ryu Kyu japonaises, le Japon et la Corée du Sud. En 1951, par le traité de San Francisco, le Japon retrouve son entière souveraineté et est considéré comme un allié face à au bloc communiste. La même année, les États-Unis forment avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande le pacte de défense de l’A.N.Z.U.S* que complètera l’O.T.A.S.E* en 1954 (les relations de ces deux pays avec le Royaume-Uni restent cordiales mais se distendent pour des raisons d’éloignement géographique). Le signal le plus fort de cette politique dans le Pacifique est l’accession formelle de l’Alaska puis d’Hawaï (avec son prolongement insulaire de Midway) au rang de 49e et 50e État américain en 1959. La course aux armements atomiques est un paramètre essentiel de la Guerre froide et l’Océanie fut directement impliquée. Les Américains expérimentent les bombes A et H aux Marshall (à Bikini et Eniwetok) et sur l’île Johnston entre 1946 et 1985 (des essais ont aussi lieu aux îles Aléoutiennes américaines dans le Pacifique Nord). L’île de Kwajalein aux Marshall servira également de site d’essai pour des lancements de missiles. Les Britanniques font des essais à l’air libre dans le désert australien en 1952 et aux îles de la Ligne. La France du général de Gaulle ouvre le Centre d’expérimentation du Pacifique (C.E.P) en 1963. Le quartier général du C.E.P est à Papeete, Hao sert de base logistique et les polygones de tir se situent à Moruroa et Fangataufa aux Tuamotu ; les essais aériens débutent en 1966 et sont poursuivis jusqu’en 1975 ; ensuite les essais seront souterrains jusqu’à un ultime essai en 1996. Tous ces essais auront des répercussions environnementales, sociales et politiques sur l’avenir de la région. Quels qu’aient été l’impact des retombées radioactives et le volume des compensations (ou des contreparties), les Océaniens dans leur majorité considèrent avoir subi sur leurs propres terres des essais nucléaires décidés dans des capitales occidentales. Les atolls où ont été effectués les essais resteront définitivement inhabitables et plusieurs populations ont été autoritairement déplacées. Les autres essais nucléaires de l’époque n’ont pas concerné la zone Pacifique : les essais de l’U.R.S.S se sont déroulés au Kazakhstan et en Nouvelle-Zemble arctique, les essais de la Chine dans ses provinces occidentales. Au total, entre 1945 et 1968, les cinq membres permanents du conseil de sécurité de l’O.N.U mettent au point et acquièrent les bombes A et H (la bombe atomique A résulte de la fission nucléaire des noyaux d’uranium et de plutonium ; la bombe thermonucléaire H est obtenue par la fusion des isotopes de l’hydrogène à savoir le deutérium et le tritium ; la bombe H et la bombe à neutrons N qui en est une variante sont les armes nucléaires les plus puissantes). La zone Asie-Pacifique a donc connu les bombardements atomiques sur le territoire japonais et les essais nucléaires dans quatre secteurs à savoir les Aléoutiennes, la Micronésie, l’Australie et la Polynésie orientale. Pour être complet, on peut rappeler l’accident nucléaire de Fukushima en 2011 dans les eaux japonaises du Pacifique Nord. L’histoire récente de l’Océanie est caractérisée par une décolonisation graduelle aboutissant à la formation d’États et de territoires marqués par une grande diversité de statuts politiques. On constate une relative stabilité du nombre des nouvelles entités politiques par rapport au nombre des colonies préexistantes. Cette évolution s’est faite dans le contexte général de la prédominance anglo-saxonne. Dans les années d’après-guerre, il y eut un mouvement mondial de revendications et d’accessions à l’indépendance. La conférence de Bandoeng en 1955 se déroula d’ailleurs en Indonésie aux frontières de 75

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