Une histoire de l'Océanie

l’Océanie. L’Océanie fit également partie de ce grand mouvement de décolonisation qui s’étala sur une trentaine d’années. Les anciennes puissances coloniales avaient elles aussi infléchi leur politique : les Français veulent rester dans le Pacifique ; en revanche, les Britanniques n’y voient aucun intérêt économique et entendent passer le relais à l’Australie en zone mélanésienne et à la Nouvelle-Zélande en zone polynésienne (le Royaume-Uni conserve cependant une position avec Pitcairn qui lui laisse un droit de regard dans le Pacifique sans lui donner beaucoup d’obligations). Les anciens territoires britanniques de l’Océanie font maintenant partie du Commonwealth (la description de nombreux drapeaux océaniens incluant l’Union Jack pourrait le montrer de manière ludique). La presque totalité des accessions à l’indépendance ou des évolutions statutaires fut pacifique et négociée. Le mouvement commence en Polynésie grâce à la formation ancienne d’élites sociales. En 1962, les Samoa occidentales, placées transitoirement sous tutelle de l’O.N.U, sont le premier pays à devenir un État indépendant, tirant partie du combat du mouvement Mau des années 1930. Mais les Samoa orientales demeurent une dépendance des États-Unis. En 1965, les îles Cook (antérieurement sous tutelle néo-zélandaise avec Niue et Tokelau) deviennent formellement un État indépendant associé à la Nouvelle-Zélande. Niue fera de même en 1974 tandis que Tokelau restera une dépendance néo-zélandaise. Notons que Niue a refusé de faire partie des Cook. Dans les faits, les Cook et Niue sont dans une situation de dépendance partielle par rapport à la Nouvelle- Zélande, mais à la satisfaction de toutes les parties : les Néo-Zélandais ne se chargent pas de toutes les responsabilités et les habitants de Cook et Niue bénéficient par exemple de la nationalité et du dollar néo-zélandais. Pitcairn reste pour sa part une dépendance du Royaume-Uni. Pour la petite histoire, l’île Norfolk, située entre l’Australie et la Nouvelle-Zélande, est une ancienne colonie pénitentiaire britannique qui a abrité à partir de 1856 des habitants déplacés de Pitcairn ; aujourd’hui Norfolk est une dépendance australienne comme Pitcairn est une dépendance britannique. Tonga accède à l’indépendance en 1970 ; le retard par rapport aux Samoa occidentales s’explique par le statut peu contraignant du protectorat britannique antérieur. Dès 1975, les Ellice polynésiennes s’étaient séparées des Gilbert micronésiennes et accèdent à l’indépendance en 1978 sous le nom de Tuvalu ; en 1979, les Gilbert auxquelles restent rattachées les îles Phoenix et les îles de la Ligne deviennent à leur tour indépendantes sous le nom de Kiribati à la demande du RoyaumeUni et malgré leur opposition à cette évolution. Quant à la lointaine Île de Pâques, département chilien, elle se dirige actuellement vers un statut de territoire autonome. Le mouvement se poursuit en Nouvelle-Guinée et en Mélanésie qui accusent, à l’exception de Fidji, un retard socio-économique certain (selon un administrateur australien des années 1930, les Papous auraient eu besoin « de moins de Christ et de plus de cricket* »). Fidji (auquel est rattachée l’île polynésienne de Rotuma), devient indépendant en 1970 sur la base d’un compromis lourd de conséquences que résume un slogan de l’époque (« La terre aux Fidjiens, le travail aux Indiens, le business aux Européens ») ; dans les faits les Mélanésiens de Fidji conservent les pouvoirs politique, administratif, militaire et foncier préparant ainsi le ressentiment des Indo-Fidjiens qui représentent la moitié de la population. En 1975, tout l’Est de la Nouvelle-Guinée qui était sous tutelle australienne (mais avait la réputation d’être ingouvernable) accède à l’indépendance avec ses mines d’or et de cuivre ; le maintien dans cet ensemble de l’île mélanésienne de Bougainville (qui était aussi sous tutelle australienne) entraîne de très graves problèmes à ce jour non réglés (une insurrection y a débuté en 1989 mais un accord de paix en 1997 ouvre la voie à une indépendance possible). Dans la décennie précédente par contre, en 1962-1963, l’Ouest de la Nouvelle-Guinée jusque-là néerlandaise avait été brutalement annexé par l’Indonésie elle-même entièrement indépendante en 1950 ; depuis cette annexion indonésienne, des mouvements séparatistes papous mènent dans l’Ouest de la Nouvelle-Guinée un combat dramatiquement oublié par le reste du monde. 76

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