theatre-et-sciences

58 Guêpe 1 : Mais regardez-vous donc ! À force de ne vous nourrir que de sucre, vous êtes toutes dodues. Replètes. Je dirais même grosses ! On ne distingue même plus votre taille, vous n’êtes qu’un tronc. Jamais vous n’égalerez l’élégance de notre Reine. (La guêpe montre du doigt la taille élancée de la Reine sur le portrait.) Abeille 2 : (en ronchonnant) Petite, Petite ! Et maintenant trop grosses ! Elle exagère un peu, quand même ! Abeille 1 : (désemparée) Oui, nous ne mangeons pas d’insectes, oui, nous sommes des pacifistes et herbivores… et malheureusement nous ne pouvons avoir d’enfants.. En fait nous… nous... Abeille 2 : … Nous sommes stériles, Madame. Dieu merci, notre mère la Reine a eu la chance de toutes nous mettre au monde. C’est grâce à ses nombreux maris... (soupir) Hum, quelle chance elle a, notre Reine… Abeille 1 : (se ressaisissant) On raconte qu’elle en a eu dix ! Dix maris !… Et qu’elle les aurait tous tués. Abeille 2 : Oh mon dieu, quelle horreur ! Tu es sûre ? Guêpe 1 : Oui, bon maintenant, elle n’est plus là votre serial killeuse ! Cela ne nous regarde pas ! Vos ragots ne nous intéressent pas. Mais c’est inconcevable de ne pas pondre. Notre Reine a mis des milliers d’œufs/ larves au monde, voyez-vous. Au tout début de notre colonie, c’était une redoutable chasseuse. Elle chassait, elle chassait autant que bon lui semblait ! Elle neutralisait ses proies avec le venin du bout de son dard et elle les dévorait grâce à ses magggnnnniiifffiiiques mandibules et à sa puissante mâchoire… Guêpe 2 : (examinant d’encore plus près l’anatomie de l’Abeille 2) Mais dites-moi, c’est quoi ça ? Je veux dire… cette poche horrible au bout de votre dard ? C’est immonde. Décidément, vous n’avez vraiment aucun style... Abeille 1 : Madame, c’est dans cette poche que se trouve notre venin… Comme je vous l’ai déjà dit nous sommes pacifistes. Si nous devions nous défendre rien qu’une fois, nous y laisserions notre dard et nous en mourrions. Abeille 2 : Fort heureusement, notre mère la Reine a pu toujours su nous défendre. Elle l’a fait à plusieurs reprises, lors d’intrusions hostiles dans notre habitation. Guêpe 2 : (avec moquerie) Hihi hihi ! Eh bien, NOUS on peut se défendre toutes seules, nul besoin de l’intervention de notre Reine... Guêpe 1 : Ah ! C’est donc ça… c’est pourquoi vous êtes obligées de vous cacher dans une ruche mielleuse, teintée de jaune et horriblement… moche ! Alors que notre Reine vit dans un nid propre, net, élégant, fait de matériaux nobles tels que des fragments d’écorces semblables à du papier, d’une belle couleur gris pur, avec des arbres majestueux dans les alentours. Voyez donc ! (La guêpe montre d’un geste large sa grande demeure.) Abeille 2 : Comme vous en avez de la chance, Madame ! Maintenant que notre mère la Reine nous a quittées, certaines d’entre nous ont dû se déplacer en essaim pour l’accompagner. Heureusement, nous sommes encore au printemps... Guêpe 1 : En essaim ? Mon dieu, quelle horreur de se retrouver collées, serrées les unes contre les autres. Nous détestons la foule, voyez-vous. Guêpe 2 : Ah oui, la foule, quelle horreur ! Abeille 1 : Mais notre mère n’a pas eu le choix, Madame. C’est juste en attendant de trouver un nouvel emplacement. Guêpe 1 : Comment ? Ne me dites pas qu’un nouveau quartier de ces ruches horribles va être construit ? Il faut absolument que je prévienne notre Reine.

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