Une histoire de l'Océanie

Aujourd’hui, l’heure est davantage à la compétition économique et à la percée de la Chine sur les marchés océaniens. Mais notons qu’aucun État insulaire océanien n’appartient au forum de coopération économique de la zone Asie-Pacifique (A.P.E.C). Seules l’Australie, la Nouvelle-Zélande et la Papouasie–Nouvelle-Guinée en font partie ; en dehors de ces trois États, les pays à avoir un P.N.B significatif sont la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française, Guam et Fidji. De même, de nombreux États du Pacifique Sud restent à l’écart de la mondialisation. Les Salomon, le Vanuatu, Tuvalu et Kiribati sont classés parmi les pays les moins avancés (P.M.A). Les échanges économiques entre les États océaniens sont eux-mêmes faibles ; il faut dire que les anciennes complémentarités économiques entre les îles sont devenues sans objet depuis longtemps. Malgré d’immenses zones économiques exclusives (la Z.E.E est établie sur 200 miles nautiques à partir des côtes), la plupart des États océaniens ont aujourd’hui peu à offrir (le temps de l’huile de baleine, du coprah et du phosphate est loin). L’exploitation des nodules polymétalliques et des terres rares reste hypothétique, la culture de la perle noire ne forme pas une activité économique suffisante, les droits de pêche sont vendus à des États industrialisés (95 % des prises de thons sont effectuées dans le Pacifique par des navires américains et asiatiques). Les productions agricoles, dimensionnées à l’échelle d’États exigus, ne peuvent rivaliser avec, par exemple, la grande cocoteraie des Philippines et de l’Indonésie. Le tourisme en Océanie ne correspond pas aux idées reçues : seuls l’Australie, la Nouvelle-Zélande, Hawaï, Guam et Fidji reçoivent des flux conséquents. Les États océaniens sont tentés par des voies économiques alternatives : constitution de pavillons de complaisance et de paradis fiscaux, rétention d’immigrants illégaux pour le compte de l’Australie, monnayage des votes à l’O.N.U… De façon générale, beaucoup d’États océaniens dépendent de l’aide internationale ou des fonds de transfert des métropoles, ouvrant le débat sur la notion réelle d’indépendance. Dans le Pacifique Sud, Australie et Nouvelle-Zélande mises à part, le retard économique est visible ; le niveau de vie reste médiocre sauf dans l’outre-mer français. La vulnérabilité du Vanuatu face au cyclone Pam (2015) est très révélatrice. Enfin, la montée du niveau des mers liée au réchauffement du climat menace jusqu’à l’existence des atolls constituant les grands archipels micronésiens et certains archipels polynésiens (Tuvalu et Tuamotu notamment) ; ce phénomène conduira à l’exil des populations, exil qui a déjà commencé à Kiribati. Pour reprendre une formulation d’Antheaume et Bonnemaison (in « Océanie »), « l’océan Pacifique est trop grand pour des États océaniens trop petits. » Les réalités de l’Océanie ne sont compréhensibles que si l’on a conscience de ses caractéristiques démographiques. Les populations de la P.N.G, des Salomon et duVanuatu sont largement rurales et enregistrent un retard d’alphabétisation. Dans les autres îles et archipels, les capitales regroupent souvent une importante proportion d’habitants. On peut classer les populations selon le multiple de 10 : • très petites populations (de 1 à 10 000 habitants) : Niue, Norfolk, Ogasawara/Minama-Tori, Île de Pâques, Pitcairn, Tokelau ; • petites populations (de 10 000 à 100 000) : Belau, Cook, Mariannes, Marshall, Nauru, Samoa américaines, Tuvalu, Wallis-et-Futuna ; • populations moyennes (de 100 000 à 1 000 000) : Bougainville, Guam, Kiribati, États fédérés de Micronésie, Nouvelle-Calédonie, Polynésie française, Salomon, Samoa occidentales, Tonga, Vanuatu ; • populations importantes (de 1 000 000 à 10 000 000) : Fidji, Hawaï, Nouvelle-Zélande, Papouasie–Nouvelle-Guinée, Papouasie indonésienne ; • populations très importantes (plus de 10 000 000) : Australie. Ces chiffres sont à mettre en regard des populations d’Indonésie (255 millions), des Philippines (105 millions), de Chine (1 365 millions), du Japon (125 millions), des États-Unis (315 millions), du Chili (15 millions). Les situations sociales des États océaniens sont souvent peu enviables. Prenons trois exemples appartenant à trois aires géographiques et culturelles distinctes. 84

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