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24 fleuron de la conjugaison, le futur antérieur, où, paradoxe du temps, l’on parle d’un futur comme d’un passé «Quand j’aurai fini mon année de grande section, je rentrerai au CP». Mais l’enfant ne comprend-il pas déjà très précocement : «Quand tu auras fini ton dessin, appelle-moi !». B. DOMAINES DE STRUCTURATION DU TEMPS Il semble particulièrement important de se consacrer à trois domaines : la chronologie, la durée et la simultanéité. Le travail sur cette dernière catégorie est souvent négligé a profit de la chronologie et du repérage dans le temps. Pourtant, c’est un domaine important parce qu’il est susceptible d’amener l’enfant à se décentrer par rapport à son temps personnel : Pendant que je suis là, les autres sont en train de… Maman, Papa, mes frères et soeurs ne sont pas là avec moi, à l’école, mais, dans le temps où je suis, moi, à l’école, ils sont ailleurs occupés à autre chose. Construire cette vision d’une simultanéité, d’abord à l’intérieur de l’espace-classe, puis progressivement, l’élargir à une représentation mentale de ce qui fait l’«épaisseur» du temps, est l’équivalent de la décentration visée dans le travail sur l’espace. Autrement dit, réaliser que «autre chose se déroule ailleurs que dans son temps prsonnel» n’est pas un processus simple. 1) La chronologie Il est nécessaire de doter l’enfant d’une logique du temps et pas seulement d’un ordre temporel. Nous voulons dire par là qu’une suite d’événement ne suffit pas à faire une chronologie, pas plus que la comptine des nombres ne fait la numération. Il faut échapper à la pure et simple juxtaposition de faits. Pour que l’enfant intègre son temps personnel au temps social, il est certes essentiel qu’il y ait de l’ordre dans sa vie et des repères. Il faut qu’il y ait des «avant» et des «après» mais la pensée doit se faire pour que les «avant» conditionnent les «après» (On se lave les mains avant de manger sinon, on n’est pas prêt à manger, on ne mange pas). C’est à cette seule condition que l’on peut faire valoir des raison- nements comme «Tu n’as pas… donc tu ne peux pas…». Il faut souligner que la contrainte de l’avant par rapport à l’après est, paradoxalement, un facteur de libération et que tout ce qui s’impose comme étapes à réaliser «avant de» me donne des armes pour maîtriser le temps. L’enfant qui s’empare de la petite carte qui représente «l’heure des mamans», pour la mettre juste après celle de l’activité en cours agit de façon «magique» comme pour compresser le temps, donc le nier. Comprendre, accepter que des étapes me séparent de cemoment où quelqu’un viendra me chercher, c’est aussi comprendre que ces mêmes étapes me permettent de l’attendre et de l’atteindre. On ne voit pas pourquoi on ne concevrait pas des petits «amas» du temps qui auraient l’avantage de matérialiser des repères temporels à la fois naturels (jour/nuit) et conventionnels (école/maison). Leur complexité serait grandissante suivant les paliers. Ce qui se réduirait à un jour /nuit pour les plus petits pourrait devenir une semaine pour les plus grands. Au lieu de leur demander si c’est une journée complète ou une demi-journée (et pas une «petite» ou une «grande» journée, terminologie infanti- lisante), pour chaque jour d’école de la semaine, les enfants devaient avoir une vue d’ensemble, une vision synoptique de la semaine : qu’ils sachent ponctuellement que mercredi et vendredi sont des demi-journées, c’est bien. Qu’ils sachent que mercredi succède à deux jours pleins et vendredi à un seul jour plein, c’est mieux. Mais, c’est encore mieux qu’ils sachent que lundi et mardi, jours pleins succèdent à deux jours «vides» (sans école), qu’il y ait orientation dans le temps comme c’est le cas pour l’espace. La logique des relations doit prévaloir sur la désignation substantialiste : ainsi «hier» n’est pas un jour en particulier, c’est le jour qui précède celui d’aujourd’hui. «Hier» n’est pas une «chose», la semaine est un système de relations. Un linguiste dirait qu’«hier» est un signifié ayant plusieurs référents (tous les jours de la semaine). L’idéal serait que cette semaine soit construite par chaque enfant et qu’il en dispose, comme les plus grands de l’élémentaire ont leurs cahiers de textes, et les plus grands encore leurs agendas.

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